19 mai 2020

19 mai 2020 - Le Centre d’information des Nations Unies à Dakar priorise une communication proche des gens pour lutter contre la COVID-19. Pour son Directeur, Damian Cardona : l’objectif est d’atteindre l’ensemble de la population, y compris la diaspora de l’Afrique de l’Ouest avec une information à la fois fiable et créative.  

? Quand j’étais en mission à Kinshasa j’aimais écouter la musique congolaise à l’excellente Radio Okapi. Elle est merveilleuse parce qu’elle mélange des rythmes africains et latinos. ? Dakar je préférais aller aux concerts pour l’écouter en direct ?, dit Damian Cardona, passionné de musique et joueur de piano, et depuis février 2015 Directeur du Centre d’information des Nations Unies (CINU) à Dakar, au Sénégal.

Certes, l’heure n’est plus aux concerts, mais aux mesures de prévention. ? Dakar le nombre de cas de COVID-19 n’est pas élevé mais un couvre-feu endort la ville de huit heures du soir à six heures du matin. Le port de masque est obligatoire depuis le 17 avril dans tous les services de l’administration, du secteur privé, dans les commerces et les moyens de transport. Et même si le confinement n’est pas complet, tous les lieux de rassemblement public sont fermés.

Depuis le début de la pandémie, et comme partie de sa communication externe, le CINU de Dakar a produit trois vidéos, et à chaque fois le choix de la musique a été essentiel. ? La dernière vidéo aborde les fakes news, des informations mensongères qui créent encore plus de peur que la maladie elle-même - par exemple, que les moustiques transmettent le virus. Dans cette vidéo, on entend les accords d’une Kora, cette magnifique guitare que l'on trouve dans toute l'Afrique de l'Ouest et qui vient de la tradition orale. Notre objectif était de donner une information fiable sur un sujet qui inquiète mais à la fois transmettre tranquillité et sérénité ?, dit Damian.

Quant aux deux autres vidéos : la première était très générique, l’intention étant d’expliquer la maladie elle-même, la deuxième, plus pratique, insistait sur les gestes barrières comme le lavage des mains et la distanciation sociale.  ? Les textes des trois vidéos sont en fran?ais mais on est en train de les doubler dans une douzaine de langues telles que le bambara, wolof, lingala ou le kirundi. Ici les élites parlent fran?ais, mais le peuple communique dans ses propres langues ?, explique Damian.

La musique un langage universel

Quand il est chez lui Damian écoute Chopin, Mendelssohn ou Liszt, mais en bon espagnol il écoute aussi Juanes, Calle 13, Mercedes Sosa ou Joaquin Sabina et, avec la nostalgie, Chavela Vargas s’invite chez lui. Pas étonnant qu’il fasse appel à la musique pour communiquer !

Le CINU de Dakar projette la réalisation d’une vidéo avec l’artiste sénégalais, Baaba Maal, émissaire pour la jeunesse du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), connu entre autres pour avoir joué avec Peter Gabriel dans la bande sonore du film ? The Last Temptation Of Christ ?. Baaba a aussi participé au clip vidéo ? 8 Goals for Africa ?, projeté pendant la coupe du monde 2010 pour promouvoir huit des dix-sept objectifs de développement durable.

Image décorative

La voix de Baaba Maal, en faveur des causes humanitaires est sans doute un atout pour transmettre des messages. Pour Damian cela va de soi, la musique a le pouvoir de mobiliser des foules, et pas question de la jouer en solo : la réalisation de la vidéo en cours se fait en coordination avec l’Organisation mondiale de la Santé et le Ministère de la Santé et de l’Action Sociale du Sénégal.

CINU Dakar : un Carrefour pour l’Afrique francophone

?tabli en 1964, le Centre d’information des Nations Unies à Dakar couvre des pays de l’Afrique francophone et lusophone, du Cabo Verde à Madagascar, la C?te d’Ivoire, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Mauritanie et le Sénégal et joue aussi un r?le important dans la région du Sahel. ? Nous voulons que les messages sur la COVID-19 arrivent aux différentes diasporas de l’Afrique de l’Ouest dans des pays comme la France, l’Espagne, ou le Canada ?, dit Damian avec sa voix cassée.  Il prêche une communication proche des gens.

Une stratégie de communication interne a été mise en place également par le CINU de Dakar avec la création d’un intranet pour les fonctionnaires internationaux et leurs familles. ? On parle d’un collectif d’environ 4 000 personnes qui pourront accéder à un forum pour partager leurs expériences ou demander des informations ?, dit-il.

Selon Damian, même si Dakar ne compte pas aujourd’hui un nombre important de cas de COVID-19, les effets économiques et sociaux de la crise sont là : beaucoup de gens ont perdu leur emploi et nous vivons un grand moment collectif d’incertitude. ? Ce qui est terrible, c’est que même si la nature de la maladie est démocratique et ne discrimine personne, ceux qui étaient déjà les plus vulnérables le seront encore plus avec la COVID-19.  Nous devons nous assurer que l’information soit aussi démocratique ?.

Allons-nous b?tir un meilleur monde après la COVID-19 ? ? Je ne crois pas qu’on va devenir ‘le meilleur des mondes’ à la Aldous Huxley ?, répond Damian, ? mais je suis s?r qu’on va corriger beaucoup de choses. L’impact aura été tellement fort qu’il nous aura appris à renforcer la santé publique, l’information, la recherche et la capacité de résilience ?.

Pour Damian, une image résume le moment : un Sénégalais sportif cours sur la corniche au long de la mer. Il est éloigné des autres coureurs et porte un masque. ? La maladie est là, mais la vie aussi ?.